Rejoprao-Mauritanie! Pour une pêche durable

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Vers une nouvelle définition de la pêche durable ! Prendre en compte les écosystèmes, les hommes et les territoires

Le pôle halieutique, mer et littoral de l’Institut Agro de Rennes publie cette semaine une nouvelle étude, consacrée à la pêche durable. Ce travail, financé par France filière pêche, a été mené dans le cadre d’un atelier partenarial qui associe les organisations de la filière pêche française, des ONG environnementales et les organismes de recherche nationaux. Il vise à redéfinir les critères d’une pêche durable, afin d’objectiver les débats entre acteurs et accompagner le secteur vers plus de durabilité.

Didier Gascuel, professeur en écologie marine à l’Institut Agro, a piloté l’étude. Il en résume ici les enseignements les plus saillants.

 

Une étude scientifique qui s’appuie sur la concertation

 

L‘étude s’appuie sur une double approche. D’un côté, elle fait la synthèse d’une très large revue de la littérature scientifique, des résultats des programmes de recherche nationaux et internationaux consacrés à la durabilité des pêches, mais aussi des démarches de certification ou de labellisation développées ces dernières années.

De l’autre côté, l’étude s’est construite étape par étape, en concertation permanente avec les représentants de la filière pêche et avec les ONG environnementales. Elle vise ainsi à construire une vision partagée des objectifs à atteindre en matière de durabilité. L’expertise des organismes de recherche (Ifremer, IRD, Université de Nantes et Brest…) a été mobilisée pour proposer des indicateurs qui permettent de mesurer chacun des critères de la durabilité.

 

Eviter la surpêche c’est indispensable … mais très insuffisant

 

Trop souvent, la durabilité des pêches est assimilée à l’absence de surexploitation des ressources naturelles. C’est une vision qui vient des approches mono-spécifiques (i.e. espèce par espèces) développées dès les années 1950. Elle irrigue aujourd’hui très largement la politique européenne des pêches, et fonde notamment la fameuse Gestion au RMD (Rendement maximum durable) et les méthodes de calcul des quotas de pêche.

Ce critère d’absence de surpêche reste évidemment important, mais il est très insuffisant. Les scientifiques savent depuis longtemps qu’il faut raisonner à l‘échelle de l’écosystème et à l’échelle des systèmes de production. Et ils montrent qu’évoluer devient une urgence, à l’heure où se font sentir les premiers effets du changement climatique et où montent dans la société des attentes liées à l’atteinte des Objectifs du développement durable (ODD).

 

Une pêche durable sait limiter tous ses impacts sur l’écosystème

 

L’approche écosystémique des pêches est une priorité ; elle vise à maintenir ou restaurer des écosystèmes sains, productifs et résilients. Elle est évidemment de l’intérêt même des pêcheurs, et beaucoup d’entre eux en ont désormais bien conscience.

Cette approche passe par une réduction progressive et permanente de tous les impacts écologiques de la pêche. Une activité de pêche durable ne peut donc se contenter de maximiser ses captures sur le long terme. Elle doit, dans le même temps, rechercher l’impact minimum sur toutes les espèces exploitées, notamment en améliorant les maillages. Une pêche durable c’est aussi une pêche qui innove en matière d’engins et pratiques de pêche, pour réduire ses impacts sur les fonds marins et sur les habitats sensibles. C’est une pêche qui sait éviter les captures d’espèces non désirées, et toutes les captures d’espèces protégées ou fragiles, une pêche qui réduit ses déchets et son empreinte carbone, et promeut des moyens de production biodégradables ou recyclables.

 

Pas de durabilité sans l’économique et le social

 

Une pêche durable c’est aussi une pêche rentable, qui diversifie ses captures et ses circuits de commercialisation, et qui sait valoriser au mieux ses produits à la première vente. C’est une pêche peu endettée, peu dépendante des subventions d’exploitation et dont les taux d’investissement traduisent la confiance en l’avenir.

Au plan social, c’est une pêche qui crée de l’emploi direct et qui contribue à l‘emploi local sur le territoire, une pêche qui assure des salaires élevés et des conditions de justice sociale, de droit du travail, et de sécurité à bord. C’est une pêche liée au territoire, qui contribue à son équilibre et à son dynamisme. C’est une pêche qui attire les jeunes et contribue à la bonne image médiatique du secteur.

 

La gouvernance de la durabilité

 

Enfin, l’étude insiste sur les dimensions de la durabilité liées à la gouvernance du secteur. La pêche ne peut être durable que si les processus de décision en matière de gestion sont transparents, qu’ils s’appuient sur l’avis scientifique et sur une approche participative. C’est notamment là le garant d’une réglementation vertueuse, comprise et respectée par tous.

Construire, en concertation, un tableau de bord de la durabilité

L’étude identifie ainsi 11 dimensions de la durabilité, déclinées en 38 critères plus spécifiques, qui définissent les objectifs à atteindre par chacune des flottilles de pêche françaises. A chacun de ces critères, elle propose d’associer un indicateur quantitatif qui permettra d’identifier les situations vertueuses, de repérer les points à améliorer, et de mesurer les progrès réalisés.

Cette définition des dimensions, critères et indicateurs de durabilité est une première étape, qui marque un tournant décisif dans la perception même de la notion de pêche durable par l’ensemble des acteurs.

La prochaine étape, que les partenaires scientifiques espèrent engager début 2021, visera à tester les indicateurs de durabilité proposés, en les appliquant à des flottilles de pêche tests. Progressivement, il s’agit ainsi de construire un tableau de bord, pour accompagner l’innovation et l’évolution de la pêche française vers plus de durabilité.

 

 

Pour en savoir plus sur l’étude, téléchargez :

La fiche de synthèse : Dewals J.-F. et Gascuel D., 2020 - Vers une nouvelle définition de la pêche durable. Synthèse de résultats, Les publications du Pôle halieutique Agrocampus Ouest, 4 p.

Le rapport complet : Dewals J.-F. et Gascuel D., 2020 - Les dimensions, critères et indicateurs de durabilité des pêches françaises. Pré-étude - rapport final, Les publications du Pôle halieutique Agrocampus Ouest n° 53, 119 p.

Contact : didier.gascuel@agrocampus-ouest.fr

Publié le : 10/11/2020



05/01/2021
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