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Expédition scientifique sur le talus mauritanien: Une vie insoupçonnée

Mise en exergue en 2005 par des sociétés pétrolières, la zone du talus mauritanien, une pente sous-marine au large de la côte qui se situe entre 100 mètre et 1500 de profondeur,  n’a pas  encore livré tous ses secrets. Des observateurs scientifiques à bord du bateau de l’Imrop «Al Awam » s’attachent donc à compléter la connaissance que nous avons de ces écosystèmes. Lors d’une campagne menée du 3 au 15 septembre, il ont ainsi pu faire de nouvelles découvertes qui vont, par exemple, contribuer à améliorer les plans de riposte aux marées noires et à réduire les risques environnementaux des activités maritimes comme la pêche, le transport ou l’exploitation pétrolière.

 

 

La zone du talus mauritanien grouille de vie marine encore insoupçonnée. Elle héberge la structure carbonatée construite par des coraux d’eaux froides; la plus longue au monde connue à ce jour. Cette butte de 100m de hauteur et de plusieurs centaines de mettre de largeur s’étend, en effet sur près de 450 km de longueur.

C’est aussi à l’aplomb de cette pente sous-marine qu’a lieu le phénomène d’upwelling si souvent évoqué lorsque l’on parle des eaux mauritaniennes. Il s’agit de la remontée des eaux profondes, riches en nutriments, vers la surface favorisant, sous l’effet de la lumière, l'émergence des phytoplanctons. Ces planctons sont à la base de chaines alimentaires dont dépend une grande partie de nos richesses halieutiques. Les chercheurs scientifiques mauritaniens surnomment d’ailleurs cette aire de zone les « pâturages  marins» . Dans ces zones le plancton est, en effet, ‘brouté’ par tout un tas de petits poissons ainsi que par des oiseaux marins ou même certains cétacés et tortues. Se concentrant au gré des saisons riches de bien d’autres particularités, cette zone reste pourtant d’une grande vulnérabilité.

 

Organisée du 3 au 15 septembre 2015, l’expédition scientifique, la seconde du genre, à laquelle ont participé des chercheurs scientifiques mauritaniens et européens s’inscrit dans le cadre du Programme BGP. Elle a été, mise en place par les autorités mauritaniennes en collaboration avec leurs partenaires techniques et financiers.

L’expédition avait pour but d’améliorer la connaissance de la biodiversité du large dans une zone où un grand nombre d’usages se superposent et où la prévention des risques est une nécessité absolue. Elle fait partie d’une série de 8 missions qui, en apportant un éclairage sur la composition et le fonctionnement de la biodiversité, doivent permettre de mieux comprendre les rouages de ces écosystèmes, leur rôle dans le renouvellement de la ressource halieutique et, partant, contribuer à mettre en place les bonnes politiques en matière de protection de la ressource (politique des pêches par exemple) mais aussi en matière de prévention et de lutte contre les risques industriels (amélioration des plans de riposte aux marées noires, adaptation des plans de gestion environnementale).

 

Cet aboutissement bénéficiant à l’ensemble des parties prenantes il n’est pas étonnant que celles-ci s’investissent d’ores-et-déjà dans ces activités scientifiques et c’est ainsi que la mission a été cofinancée par la société pétrolière Kosmos Energy, firme pétrolière engagée dans l’offshore mauritanien et qu’elle a vu la participation de plusieurs étudiants et représentants de la société civile.

 

 

«Sous l’Océan un autre monde» (D. Pauly)

 

 

Lancée depuis le port d’attache du bateau «Al Awam », à Nouadhibou, l’expédition scientifique a longé la zone du talus où elle a découvert de fortes concentrations d’espèces marines insoupçonnées. Les résultats de l’expédition n’ont pas encore été officiellement rendus. Mais déjà l’on sait que cette expédition a pu répertorier dans  cette zone plus de 5000 cétacés. , Les chercheurs ont également été surpris par la découverte d’une jeune baleine bleue. La richesse biologique de cette aire a permis en outre de compter plus de 3000 dauphins communs brévirostres, alors que dans le sud de la zone de ce sont de grands troupeaux de dauphins de Clymène qui ont accompagné le bateau pendant de longues périodes. Cette espèce est rarement observée. Ce signalement a donc une valeur considérable sur le plan naturaliste en plus de fournir des éléments précieux pour la réduction des risques environnementaux. Les informations sur les cétacés permettent en effet de mieux planifier les campagnes d’explorations pétrolières par exemple.

 

 

 

Mais ce n’est pas tout. Le phénomène de l’upwelling dans cette aire étant à l’origine d’une éclosion biologique importante, attire également des milliers d’oiseaux dont certains restent exclusivement marins. 14 espèces de pétrels de tempête ont ainsi été identifiées dont certaines ne quittent cette zone que pour nicher dans l’Arctique ou dans l’Antarctique. A cette époque de l’année les oiseaux majoritaires sont issus de populations et d’espèces qui élisent domicile sur le Talus mauritanien en été ou pour fuir les grands froids au Sud. C’est notamment le cas des Océanites de Wilson. Un nombre impressionnant de guifettes noires, originaires des zones marécageuses de Russie, ont aussi été repérées. Pour elles, il s’agit simplement d’une étape sur leur route vers le large du Ghana où elle passe l’hiver (boréal).

 

 

L’expédition a ainsi sillonné toute la zone du talus pendant 12 jours et a permis l’identification et le dénombrement des oiseaux marins et de la mégafaune (baleines, dauphins, tortues, requins).

En attendant que les chercheurs publient leur découverte, on peut d'ores et déjà considérer que la mission fut un succès à plusieurs titres. Tout d’abord elle a renforcé les liens entre la recherche nationale et ses partenaires étrangers. Elle a aussi consacré l'inclusion des acteurs privés et de la société civile dans ces activités de renforcement des connaissances. Enfin, elle va surtout apporter une quantité considérable d’informations qui seront précieuses pour l’Etat mauritanien dans la gestion durable des ressources renouvelables et dans la réduction des risques environnementaux sur ses eaux territoriales.

 

JD



02/11/2015
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